mercredi 10 novembre 2010

Nano, troisième

Et d'ici la fin de la semaine, on vise les 50K - avec les deux jours toute seule à la maison qui s'annoncent jeudi et vendredi, le wordcount devrait décoller...

Vanéa se força à se réveiller. C'était quelque chose qu'elle savait faire depuis toute petite, quand un cauchemar devenait trop effrayant, quand une petite partie de son esprit se rendait compte qu'elle dormait. Elle savait forcer cette part d'elle-même à prendre une place de plus en plus grande, jusqu'à ce qu'elle se réveille en sursaut, dans son lit, le coeur battant mais ses terreurs derrière elle. Et cette fois-ci ne fit pas exception ; elle s'assit d'un seul coup dans un lit inconnu, un lit d'auberge, dans une chambre noire et inamicale, sans personne, pas même une peluche à serrer contre elle, et surtout pour l’aider à oublier la sensation fugace qu'on cherchait à la retenir, comme si dans son rêve, la Marysa imaginaire avait eu elle aussi prise sur son être. C'était une sensation à la fois inédite et foncièrement désagréable.

Elle se leva, incapable de se rendormir à ce moment-là, et marcha jusqu’à la fenêtre de sa chambre. D'où son inconscient avait-il tiré cette image de Marysa ? Elle ne connaissait personne ayant cette stature imposante et cette chevelure rousse. Ce trait, en particulier, était d'une rareté extrême car souvent il nécessitait que les deux parents d'un enfant le possèdent – et ce genre de mariage était découragé, à cause de la mauvaise réputation du roux et de son lien avec la magie. On essayait ainsi de limiter le nombre d'enfants roux, pensant qu'ils étaient plus exposés à la tentation pour une raison ou une autre. Du coup, elle n'était même pas sûre d'en avoir déjà vu un en vrai, ailleurs que dans les livres ou les portraits. Peut-être était-ce de là qu'elle tenait l'image de Marysa ? Peut-être avait-elle croisé une image de sorcière brûlée au bûcher et l'avait-elle calquée sur elle ? Vanéa avait une mémoire photographique et ne se souvenait pas d'une telle image, mais elle était la première à se reconnaître faillible, et encore plus dans le noir aux petites heures du matin. Elle s'accouda à la fenêtre qu'elle avait ouverte pour avoir un peu d'air frais. Tout était silencieux dehors, même les animaux. Il devait être vraiment tard – ou tôt. Elle avait toujours bien aimé cette heure où personne d'autre qu'elle n'était réveillée et où le monde lui appartenait, en un sens, puisqu'elle était la seule à le voir.

Mais un mouvement attira son attention, du côté des écuries. Quelque chose d'à peine visible, une silhouette, noir sur noir. Curieuse, elle se pencha, faisant le moins de bruit possible, sentant sans trop savoir pourquoi qu'elle ne devait pas être vue si elle voulait voir. À une heure pareille, cela ne pouvait pas être quelqu'un vaquant à une occupation honnête ou à tout le moins avouable. Au mieux, un palefrenier sorti faire ses besoins, trop fainéant pour aller jusqu'aux latrines, au pire, un voleur de chevaux. Mais quand la silhouette se glissa le long du mur, Vanéa acquit la conviction absolue et irrationnelle qu'il s'agissait de Morad. Quelque chose dans sa manière de bouger lui rappelait le Limier, et c'était tout à fait son genre de fouiner dans le noir, quand les gens normaux avec des Vocations normales étaient couchés. Ou réveillés à cause d'un cauchemar, amenda-t-elle, mais certainement pas dehors à traîner, en tout cas.

Quand un rayon de lune illumina un instant fugace le visage du rôdeur, l'intuition de Vanéa fut confirmée. Il s'agissait bien de Morad, vêtu d'une espèce de justaucorps noir qui dissimulait même ses cheveux. Il était limite un peu ridicule, et puisqu'elle l'avait vu, cela ne servait même pas à grand-chose.

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