vendredi 30 juillet 2010

Oui, mais...

Le début de phrase maudit. Les mots qu'on n'a pas envie d'entendre. Et, j'ai un scoop, les mots à ne jamais utiliser quand vous vous adressez à une femme qui se marie dans 15 jours et qui, jusqu'ici, était remarquablement détendue.
Oui, mais.
La chose se décline à l'infini.

[start rant]

- Oui, mais, moi j'aurais plutôt vu ça comme ça (ben t'avais qu'à le faire plutôt que de rester assis sur ton cul).
- Oui, mais, t'es sûre que t'es vraiment dans les temps ? Je me demande si t'es pas un peu en retard quand même (et c'est supposé m'aider comment ?).
- Oui, mais, au niveau de ce qu'on a prévu de faire ce week-end, tu veux pas le faire ce soir plutôt, en rentrant du travail ? (non, comment te dire, je bosse, je suis fatiguée là)
- Oui, mais, t'es sûre que tout est sous contrôle, vraiment ? (non, je dis ça comme ça, j'en ai pas la moindre idée, en vrai, d'ailleurs vous savez quoi, c'est pas moi la mariée, c'était une blague, il épouse ma soeur, c'est elle qui gère)
- Oui, mais, au mariage d'untel on avait fait comme ça (vous connaissez l'expression anglaise "to add insult to injury" ?...).
Et à la fin de la discussion, quand je finis par perdre mon calme :
- Oui, mais, si tu es stressée comme ça, tu devrais prendre des calmants quelques jours avant ton mariage.

[end of rant]

Le seul cas où c'est acceptable et même bienvenu c'est quand, à la fin d'une journée difficile, on se plaint au futur marié du calvaire subi, et qu'on conclut, parce qu'on est lucide, par une phrase du genre :
- "Je sais que je suis un peu hystérique, mon chéri, je suis désolée."
Et qu'il répond :
- "Oui, mais, je t'aime quand même".

lundi 26 juillet 2010

Dans la brume

Si vous cherchez un livre d'horreur court mais qui vous claquera un grand coup, the Mist, la novella de Stephen King initialement publiée dans le recueil Skeleton Crew, est ce qu'il vous faut. Si vous cherchez un film d'horreur bien réalisé et qui vous claquera encore plus fort, l'adaptation de The Mist par Franck Darabont est là pour vous.

J'ai lu la novella (nom donné à un texte qui n'est pas tout à fait un roman mais tout de même bien trop long pour une nouvelle, c'est un format cher à King chez qui un roman c'est tout de suite 800 pages) la semaine dernière, j'ai regardé le film ce week-end. Le livre est génial. Comme souvent chez King, ce ne sont pas tant les évènements surnaturels qui sont effrayants, encore qu'ils le soient bien comme il faut ; non, le pire, ce sont les réactions des hommes et des femmes à ces évènements, la façon dont l'esprit humain réagit à la peur et au désespoir sous la plume du Maître.
Le synopsis, comme souvent, est d'une glaçante simplicité : alors que la brume envahit une petite ville du Maine, certains de ses habitants se retrouvent bloqués dans la supérette locale, n'osant plus sortir car dehors, dans la brume, il y a des choses. C'est un de ces huis-clos où peu à peu les choses dégénèrent, aussi bien dehors où les choses se font de plus en plus pressantes, que dedans où la peur dissout le vernis de la civilisation humaine. Dans ce registre, King est à son meilleur. Son message est redoutablement efficace : l'homme n'est pas foncièrement bon, au contraire, et sous un stress suffisant, notre vraie nature primitive et violente se révèle. C'est chacun pour soi, et on est prêt à suivre n'importe qui promettant une solution, une salvation.

Le livre est déjà bon. Le film est meilleur. C'est sans doute la seule et unique fois que l'on me verra dire cela, mais force est de constater que Darabont a fait un travail incroyable. King lui-même est ressorti de là en disant "wow", et ma réaction était à peu près du même acabit. La force du film, c'est de reprendre avec talent l'histoire du livre, parfois presque mot à mot sur certains dialogues. Mais c'est aussi cette scène rajoutée et cette scène enlevée, l'une apportant beaucoup et l'autre n'enlevant rien. Et c'est surtout cette fin ; je ne ferai pas de spoiler, mais la fin du film n'est pas celle du livre. Elle est meilleure, ou pire, c'est selon le point de vue. A la place de Stephen King, je m'en voudrais de ne pas avoir fini ainsi.


Et puis, quand on est comme moi une inconditionnelle de l'auteur, le méga-clin d'œil à la Tour Sombre dès la première image du film, c'est le genre de chose qui vous gagne d'office. En même temps, Franck Darabont, c'est aussi the Green Mile et Shawshank's Redemption, et donc le fait qu'il connaisse, apprécie et sache nous faire rentrer dans l'univers de Stephen King ne devrait plus être une surprise.
D'après wikipedia, il aurait acquis les droits pour l'adaptation de the Long Walk ("marche ou crève", pour une fois que le titre français est aussi bon...), ce qui a provoqué chez moi une réaction ravie à base de gloussements qui n'est pas sans m'inquiéter sur ma santé mentale. Non parce que, dans le genre roman morbide, on n'a pas fait mieux depuis.

Entre ma passion pour le cerveau tordu du "Maître de l'Horreur", et celle non moins dévorante que j'entretiens pour tout ce qui est rose, parfois je me demande comment Jarjar peut avoir l'air aussi calme à l'idée de m'épouser.

mardi 20 juillet 2010

He’s back… and he’s pissed off

Chez nous, ce week-end, c’était la revanche du déménagement.

Il y a deux ans, nous avions emménagé dans l’appartement de Jarjar, qu’il avait prévu pour être sa garçonnière. Manque de bol, à deux, on en a vite vu les limites ; pas assez de place, pas assez de rangements, des livres qui s’accumulent sur toutes les surfaces libres, des fringues qui ne rentrent plus dans les placards, la cuisine qui déborde sur le salon. Du coup, quand l’occasion s’est présentée d’emménager dans plus grand, et malgré un mariage à organiser en parallèle, nous n’avons pas hésité, et c’est donc entre mercredi dernier et hier que nous avons bougé le contenu de notre appartement.

Et nous avons, avec un plaisir mitigé, retrouvé nos amis les designers suédois, ceux avec l'enseigne bleue et jaune, les pas de vis trop petits, les têtes de vis qu'on défonce en deux secs, les charnières de porte cannibales qui vous arrachent des bouts de doigts, et les tiroirs de travers sur lesquels on se venge en leur remettant la tronche droite à coups de maillet - ne venez pas me dire que je suis la seule à me venger sur mes tiroirs passé un certain nombre d'entailles.
Parce que si nous avions déjà, il y a deux ans, passé un long moment en compagnie des paquets plats, je crois que j'avais oublié les mille-et-une galères auxquelles on s'expose quand on se lance là-dedans. Et cette fois-ci, c'était la vengeance de l'étagère et du meuble de salle de bains. Entre les paquets qui pèsent un âne mort (57 kilos l'étagère tout de même), les vignettes de couleur qui ont disparu des paquets en question (je ne souhaite à personne ce moment où un carton révèle une étagère blanche à la place de celle, noire, que l'on voulait acheter), les pieds qui se vissent en force dans une planche car les trous n'existent pas et que c'est prévu comme ça (je n'y croyais pas à celle-là), ce sont des heures et des heures que nous avons passées, des moments que j'espère oublier très vite. Dès que les bleus et les bobos dont je suis couverte auront disparu, en fait.

Cette fois j'ai compris la leçon : pas de déménagement avant plein d'années. S'il le faut vraiment, payer quelqu'un pour préserver sa propre intégrité physique - et mentale.

Et si jamais, d'ici là, nous avons un schtroumpf, le mettre chez sa grand-mère pour éviter qu'il apprenne plein de nouveaux mots.

vendredi 9 juillet 2010

Oh, une série de fantasy (encore)

Le site de vente en ligne bien connu où je me fournis en livres - le choix de livres en anglais n'ayant rien à voir avec ce que l'on trouve en librairie, même sur Paris, ou alors pas au même prix - a une fonctionnalité amusante qui lui permet de me donner des conseils de lecture en fonction de mes commandes précédentes et de la note que je leur ai attribué. Au début, je n'étais pas vraiment convaincue par la chose, mais j'ai quand même pris le risque, et j'ai commandé Dead Until Dark de Charlaine Harris, le premier tome de ce qui sera devenu plus tard une série télévisée sous le titre True Blood. Dans les semaines qui ont suivi, je me suis descendue l'intégralité de trois séries écrites par cet auteur.

Depuis, je prends beaucoup plus en compte les conseils du robot dans l'ordinateur. Il m'en a d'ailleurs donné quelques-uns dont la qualité n'est pas à démontrer : Brandon Sanderson, Georges R.R. Martin. Stephen King, aussi, et maintenant que j'ai commencé à cliquer "vous l'avez déjà", il n'arrête plus. Au moins je ne louperai pas le prochain.

Tout ça pour dire que c'est en suivant ces fameux conseils que j'ai découvert Maria V. Snyder et le premier tome de sa série Yelena Zaltana, Poison Study. Et je n'en suis pas mécontente, comme le prouve le troisième tome qui trône actuellement sur mon bureau. C'est une série de fantasy tout ce qu'il y a de plus classique du genre, une héroïne qui part d'une situation humble et globalement pas brillante (condamnée à mort dans un donjon), à qui on offre une "chance" de survie (devenir le goûteur du Commandant, celui qui contrôle tout le pays, et risquer sa propre vie à chaque plat goûté), et qui se découvre un pouvoir inattendu - et une petite histoire d'amour pour couronner le tout. Simple, frais, efficace. Et au moins on est face à une héroïne qui pousse dans l'autre sens quand on la cherche, pas le genre de gnan-gnan qui s'écrase et se laisse insulter dans l'espoir d'être acceptée de tous (Fitz, si tu m'entends). Le rythme est soutenu, sans longueur inutile, du coup ça se lit bien et vite. Le découpage est très cinématographique, dans le sens où les chapitres se terminent souvent au milieu d'une action, au moment crucial, plutôt qu'à la fin d'une scène. Du coup, paf on tourne la page.

C'est d'ailleurs peut-être un bémol pour moi ; trouvez-moi bizarre si vous voulez, mais j'aime bien pouvoir poser mon livre en arrêtant ma lecture à un endroit qui fait sens. Difficile d'en trouver un dans ces romans, et du coup difficile de reprendre le lendemain sans devoir revenir deux-trois pages en arrière.

Enfin, comme défaut, je suis la première à reconnaître qu'on a fait pire.

mercredi 7 juillet 2010

Critiquer, des fois, c'est pas trop possible

Or donc, j’ai terminé Under Heaven cette semaine. Par rapport à d’autres romans, il se peut que je l’aie volontairement fait un peu traîner, car les romans de Guy Gavriel Kay sont comme des pierres précieuses, aussi rares et aussi beaux, taillés à la perfection. On n’a pas envie de les lâcher, pas vraiment, même si on a envie de savoir la suite. Leur rythme un peu lent, souvent, permet justement de faire durer le plaisir, de reposer le livre de temps à autres, et d’une certaine manière c’est presque plus agréable que les romans que l’on dévore en une nuit sans les reposer, en ayant au matin une sensation d’inachevé, de « et donc ? ».

Under Heaven commence près d’un lac dans les montagnes, lieu de nombreuses batailles, où un dénommé Shen Tai a passé près de deux ans à enterrer les morts. Il le fait pour honorer le deuil de son propre père, général qui s’est battu dans la dernière guerre à cet endroit, et dont il se rappelle la tristesse. Mais ses actions impressionnent une princesse exilée, qui va lui faire un présent démesuré, de ces présents que fait la royauté sans penser aux conséquences sur la vie d’un homme simple – ou sans s’en soucier. Dans ce monde basé sur la Chine Impériale de la dynastie Tang, il ne fait pas bon s’écarter de son statut ou posséder soudain une richesse que l’Empereur lui-même peut convoiter, et Shen Tai sait que s’il ne joue pas le jeu des puissants, il ne survivra pas assez longtemps pour revoir ceux qui lui sont chers.

Je n’en dirai pas plus sur l’intrigue ; une grande partie du plaisir de ce roman vient de la découverte. L’autre partie vient de la narration, poétique, impeccable, ciselée presque, et des personnages attachants. Chez Guy Gavriel Kay, point d’amour triomphant de tous les obstacles, point de personnage unidimensionnel, point d’intrigue ultra-convenue. On voudrait bien d’ailleurs, parfois, qu’il se laisse aller à ces travers, car on a de grands moments de « c’est trop injuste » en lisant ses romans (surtout quand on a une âme de midinette comme moi). C’est trop injuste, mais c’est souvent comme ça que ça se serait passé dans la vraie vie – voire dans la réalité historique, car certains de ses romans, et c’est le cas de Under Heaven, sont un miroir des évènements de notre monde, un miroir légèrement déformant, utilisant le prisme du fantastique pour réinterpréter l’Histoire.

En tout cas, un grand moment de lecture, comme toujours avec lui, et maintenant, je n’ai qu’une hâte : le prochain !